Grand con

« Je m’attendais depuis quelque temps à recevoir une de ces lettres d’insultes dans lesquelles tu excelles et qui te permettent pour un instant de t’imaginer écrivain. J’y réponds avec retard, triste bureaucrate malheureux, mon boulot ne pouvant pas attendre, ta connerie si. LIRE LA SUITE

Gahan bourre Bercy

Première fois à Bercy (qui s’appelle l’AccorHotel Arena depuis 2015). Premier concert de Depeche Mode. Et première partie assurée par un trio chinois gentiment infernal, Re-TROS. Toujours se méfier des groupes à tiret. Aller voir un groupe que l’on écoutait étant enfant et choisir de faire face à son vrai public actuel, c’est une prise de risque. Et la désillusion peut être grande pour ceux qui ne s’y sont pas préparés. « Rien à foutre, ils sont nuls depuis le départ de Vince Clarke/ils sont nuls depuis le départ d’Alan Wilder »… Certes. Vous repensez à ces phrases à la vision du logo Peace & Love sur leur batterie, durant la publicité de leur partenariat avec la marque de montre Hublot et leur campagne d’approvisionnement des pays pauvres en eau ainsi qu’à la vue de cette Ola, lancée par un public impatient et jugeant utile de manifester leur allégresse sur « Revolution » des Beatles. A la question : Depeche Mode sont-ils vraiment de gauche ? La réponse est désormais claire. LIRE LA SUITE

188 mots de Jacques Rigaut

« Quand je me réveille c’est malgré moi. »

« La plus belle fille du monde ne peut me donner que ce que j’ai. »

« Il y a des gens qui font de l’argent, d’autres de la neurasthénie, d’autres des enfants. Il y a ceux qui font de l’esprit. Il y a ceux qui font l’amour, ceux qui font pitié. Depuis le temps que je cherche à faire quelque chose! Il n’y a rien à y faire. »

« Il n’y a de progrès, de découverte que vers la mort, il n’échappe à personne que l’adage tous les chemins mènent à Rome est une sorte de calembour, Rome ne pouvant signifier que mort que l’on a retourné. »

« Il n’y a pas de raisons de vivre, mais il n’y a pas de raisons de mourir non plus. La seule façon qui nous soit laissée de témoigner notre dédain de la vie, c’est de l’accepter. La vie ne vaut pas qu’on se donne la peine de la quitter. »

« Essayez, si vous le pouvez, d’arrêter un homme qui voyage avec son suicide à la boutonnière. »

Le jour se lève, ça vous apprendra, Jacques Rigaut (1898-1929), 2009.

Touch Down

Ruben Östlund (2004-2017) : L’art du mälaise

GITARRMONGOT (2004)

Premier film d’Östlund après sa période ski, The Guitar Mongoloid ne raconte aucune histoire. Son personnage central, un joueur de guitare aux capacités psychomoteurs limitées, mendie dans les rues de Göteborg en livrant sa propre version du « Lion est mort ce soir ». Le soir, il prend le tram en faisant des gros doigts à son père (son beau-père ? son grand-frère ? son pote ?) qui fait la même chose de ses journées et ils se retrouvent dans la chaleur d’un foyer pour jouer à nouveau mal de la guitare. A côté de ça, toute la Suède mongoloïde nous est présentée en plan fixe, le dogme que Östlund ne fera que répéter et améliorer par la suite. Des adulescents attardés jettent des vélos dans un port, les accrochent à des lampadaires, les jettent d’un pont, les agressent non-stop, les haïssent du plus profond de leur être… la Ligue de Défense des Vélos a certainement dû être abasourdie par autant de violence gratuite. D’autres, plus vieux, et encore plus débiles, jouent à la roulette russe. D’autres très jeunes se lancent dans un concours de ‘sieg heil’ rythmé en salle de gym. Deux shitheads se filment tentant de se briser une bouteille de bière sur le crâne (dédicace chauvine au sweat Royal Wear et au maillot Zidane). Des motards se bastonnent pour une rayure. Des skaters se shootent à l’hélium. Une voiture devient folle sur un parking. Une vieille dame déjà folle parle aux portes. Et ainsi de suite. La Suède de 2004 dans toute sa débilité et son non-sens et aucune influence à revendiquer. Même pas celle d’Harmony Korine. A la limite, celle du Norvégien Roy Andersson. Le plan final est d’ailleurs très beau dans sa laideur : le garçon assemble des dizaines de sacs poubelle ensemble, les gonfle et les fait s’envoler dans le ciel. Les passants s’arrêtent pour admirer cette poubelle géante dominant la ville.
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Le mouton enragé

« J’étais un sale type à un moment, je l’ai payé cher. J’aimais bien les femmes et je n’étais pas toujours très gentil. Cela m’a beaucoup tourmenté mais j’ai souvent été l’arroseur arrosé également. Après, quand on est marié, parfois l’autre nous énerve, et même si on l’aime beaucoup, on a envie d’autres femmes. A cette époque, je n’étais pas très fréquentable, je suis bien mieux depuis. Après, il y a les romances de tournage, j’étais assez joli et comme je n’avais pas grand-chose à raconter, je ne disais rien. Une fois qu’elles me connaissaient en revanche, je ne faisais plus illusion… »

Jean-Louis Trintignant, So Film #54, 2017.

Futuro Clouzot

LAISSEZ BRONZER LES CADAVRES (2017)

Sur le papier, j’étais la cible privilégiée du troisième et dernier long-métrage du couple Hélène Cattet et Bruno Forzani. Déjà, c’est une adaptation d’un roman de Jean-Patrick Manchette et Dieu sait que c’est touchy. Les dernières en France remontent à l’ère de la Série Noire et du POLAR80, a l’époque où Alain Delon donnait l’impression d’avoir racheté le back catalogue de l’écrivain. Elles étaient toutes plus ou moins ratées, et jamais aussi pessimistes et nihilistes que le matériau de base. En 2015, La Position du tireur couché a été de nouveau adaptée, par un certain Pierre Morel, avec Sean Penn et Idris Elba (ouais ouais). Je n’ai pas vu ce Gunman, mais je ne crois pas avoir loupé grand-chose. Bref, Laissez bronzer les cadavres !, premier roman de Manchette (et Jean-Pierre Bastid), récit ultra-précis, à la fois ensoleillé et glacial, d’un hold-up et du siège qui s’en suit chez une peintre et ses « amis », a longtemps été considérée inadaptable jusqu’à ce que les deux cinéastes franco-belges ne s’y collent. Après Amer et L’étrange couleur des larmes de ton corps, plutôt des « expérimentations » voire des « expériences visuelles et sonores » que des films classiques, autant inspirés par le giallo que par la photo ou les arts plastiques : fans de polar, de western et de violence esthétisée attendaient ce projet au tournant. LIRE LA SUITE

Pandore

On raconte que tu aimes « ça »…

« Les lampes inondaient cruellement de leur lumière l’épais visage en sueur du boucher. Le chœur des policiers le harcelait :
– Tu étais l’amant de Fernande, hein!
– A mon âge, voyons, messieurs…
– Tu es un peu vicieux pourtant… En ville, on raconte que tu aimes « ça »…
– Je vous assure messieurs… Ce sont les mauvaises langues qui…
– Obsédé sur les bords que tu es… On a retrouvé chez toi un tas de dessins pornos!
Les inspecteurs lui jetaient alors sous les yeux les paires de fesses, les nichons en pointe, les petits Eros à flèches et autres esquisses osées qu’il avait crayonnées distraitement, dans des moments de désœuvrement, sur de petits carrés de papier.
– D’innocentes caricatures, messieurs… Je vous assure… Quel est l’écolier un peu précoce qui ne dessine pas les mêmes sur ses cahiers de brouillon?… De là à tuer quelqu’un!…
– Tu es un gros cochon! LIRE LA SUITE