Sérieux ?

« Dans un merveilleux article consacré à la diversité des sciences sociales, le Norvégien Johan Galtung comparait, il y a plus de trente ans, les styles intellectuels anglo-saxon, germanique, français et japonais (Saxonic, Teutonic, Gallic et Nipponic selon sa propre terminologie). Il y évoquait l’intellectuel anglais ou américain, empirique, concepteur d’une multitude de pyramides de taille modeste, point trop abattu lorsque l’invalidité de l’une de ses petites constructions était démontrée. Il peignait l’intellectuel japonais comme un homme (ou une femme) pourvu(e) d’une roue mobile lui évitant un engagement trop fort dans un modèle trop défini, soucieux avant tout de ne pas oublier la complexité du monde. Il y décrivait l’intellectuel allemand, architecte d’une impressionnante pyramide unique, mais prêt à s’effondrer psychologiquement si la fausseté de son système était prouvée. Il en venait enfin à l’intellectuel français, bâtisseur comme l’Allemand d’une grande théorie, mais que Galtung représentait joliment comme un hamac tendu entre deux pôles, un système sous tension jamais pris complètement au sérieux par son auteur, lui-même pressé de fuir autour d’un bon déjeuner une discussion de fond. Écoutons Galtung : « Je pense que l’intellectuel allemand (Teutonic) croit vraiment ce qu’il dit, une chose que son équivalent français (Gallic) ne ferait jamais vraiment… L’intellectuel français (Gallic) aurait plutôt tendance à considérer son modèle comme une métaphore qui jette un peu de lumière sur la réalité mais ne devrait pas être prise trop au sérieux. » LIRE LA SUITE

Voyoucratie


Salut à toi le voyoucrate, salut à toi Dave Decat.

La Vérité

Comment favoriser en nous cette sorte de délivrance ? Tout est paradoxal chez l’homme, on le sait bien. On assure le pain de celui-là pour lui permettre de créer et il s’endort, le conquérant victorieux s’amollit, le généreux, si on l’enrichit, devient ladre. Que nous importent les doctrines politiques qui prétendent épanouir les hommes, si nous ne connaissons d’abord quel type d’hommes elles épanouiront. Qui va naître ? Nous ne sommes pas un cheptel à l’engrais, et l’apparition d’un Pascal pauvre pèse plus lourd que la naissance de quelques anonymes prospères.

L’essentiel, nous ne savons pas le prévoir. Chacun de nous a connu les joies les plus chaudes là où rien ne les promettait. Et nous ont laissé une telle nostalgie que nous regrettons jusqu’à nos misères, si nos misères les ont permises. Nous avons tous goûter, en retrouvant des camarades, l’enchantement des mauvais souvenirs.

Que savons-nous, sinon qu’il est des conditions inconnues qui nous fertilisent ? Où loge la vérité de l’homme ?

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Travail ? Jamais !!

Glissez !

« Je demeurais songeur et triste devant la tombe que les fossoyeurs comblaient. Je tentais de mémoriser un discours de Ouap, de ces discours décousus qui pourtant frappaient juste et touchaient fort. Les termes exacts étaient presque ceux-ci : « Plaquez tout, les petits. Le travail – dans ce contexte – n’ennoblit pas l’homme. Les idéologues qui prétendent le contraire, quelle est leur profession ? Et quelles sont les chances de durée, je veux dire de durer dans l’amour, d’un couple qui se sépare à 7 heures pour se revoir vers 20 heures, fatigué, au cœur d’une bruyante cité HLM ? Moi, je suis parti longtemps, préférant la gêne dans le bleu de la Provence à la survie au milieu des odeurs de choux et de volailles, ici. Vos yeux sont des miroirs las de refléter les grues, le ciment, les tours et les usines. Glissez, mortels, sur la pente savonneuse du turbin-chagrin ! Glissez vers les cimetières populaires surpeuplés ! Glissez sur vos rêves écrabouillés, magma rosissant et doré des splendeurs à venir. Glissez sur le flot de vos larmes rentrées, sur votre sueur, sur le sang des règles qui prend l’ouvrière debout quand, ailleurs, on va « s’étendre un moment ». Eh oui ! petit, je m’excuse mais c’est comme ça ! Glissez sous ce beau ciel qui part pour ailleurs ! Glissez au rythme du piano du voisin d’à côté qui était peut-être un virtuose et qui attend son cancer loin de l’odeur du lilas et des roses ! Glissez, mortels et songez que ce n’est pas juste vis-à-vis des garçonnets et des fillettes que vous étiez et qui auraient dû avoir tous les droits ! Ah ! nom de Dieu, vive la Révolution ! »

Tueurs de flics, Frédéric H. Fajardie, 1979.
Légende : Anthony Dominguez.

Italia 2018

TURIN (Piémont)


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MANGER

DOGMAN (2018)

Marcello, toiletteur pour chiens dans la région de Naples (Caserte pour les puristes et les touristes), mène une vie de ptit pépère malgré un cadre de vie franchement morose, entre les pâtes bolo avec ses potes commerçants et les meilleurs amis de l’homme qu’il caresse dans le sens du poil. Divorcé et père d’une petite fille, il n’arrive pas vraiment à joindre les deux bouts. Pour nourrir leur passion commune, la plongée sous-marine, il s’occupe donc des narines du voisinage. Seulement quand Simoncino vient prendre sa dose quasi-journalière de cocaïne, il ne paye jamais, ou alors en muscles. La situation s’envenime et la brute épaisse en demande toujours plus jusqu’à braquer l’acheteur d’or voisin de Marcello. Virage tragique. Ne voulant pas dénoncer le truand qu’il croit son ami, Marcello, 40 kilos tout mouillé, purgera une peine d’un an à sa place. Matteo Garrone a la délicatesse de filmer à peine le séjour derrière les barreaux, comme quoi le réalisateur de Gomorra sait déjouer les clichés. LIRE LA SUITE

FRANCE98

« Quand vous êtes entendus dans l’affaire Festina, vous êtes plusieurs à confesser avoir pris de l’ecstasy le soir de votre expulsion du Tour en 98…
Ouais, on est à Brive-la-Gaillarde, tout va plutôt très mal et nous on va se mettre sur le toit, le soir… Je ne vais pas entrer dans les détails mais disons qu’on a vécu une sacré soirée. On a été au bout de notre histoire, fallait que ça finisse comme ça… Tôt ou tard, ça nous serait tombé sur la gueule, faut bien le dire, on avait atteint un niveau… On allait gentiment dans le mur. Après, il y a des tas de choses qui expliquent que ce soit tombé sur nous. Notre suprématie gênait beaucoup et forcément, la suspicion s’était installée. Ça n’a pas aidé qu’on soit tout le temps devant. Quand t’as huit Festina qui font le tempo et que derrière t’as huit ou dix mecs qui arrivent à suivre… » (…) LIRE LA SUITE

Je suis la haie et l’eau noire

« Il n’y a rien de plus sot qu’un journal, du moins aussi longtemps que son auteur vit. Je n’ai jamais été découragé par la niaiserie, tout ce qu’on écrit de sincère est niais, toute vraie souffrance a ce fond de niaiserie, sinon la douleur des hommes n’aurait de poids, elle s’envolerait dans les astres. Que dire encore ? Si vous voulez souffrir tout seul, taisez-vous. Sinon n’allez pas chercher, sous prétexte de sympathie votre propre souffrance dans le cœur d’autrui avec une pince à sucre, en fronçant le nez, comme ce pauvre M. de Montherlant, d’un air de dire qu’on n’a pas faim, qu’on fait semblant, par politesse, qu’on a pris l’habitude, dans son enfance, d’une nourriture plus distinguée. Je sais cela, n’importe. Je sais aussi que je ne suis plus sûr de ceux pour lesquels j’écris, plus sûr du tout de trouver le chemin de leur tristesse ou de leur joie. Alors, à quoi bon ? Je n’aurais pas honte de les prier de me consoler, car bien que je ne sois pas affamé de consolation d’un pape ou qu’un cardinal, je ne serais pas assez fou pour repousser leur aumône. Mais la vie m’enseigne que nul n’est consolé en ce monde qui n’ait d’abord consolé, que nous ne recevons rien que nous n’ayons d’abord donné. Entre nous, il n’est qu’échange, Dieu seul donne, lui seul. LIRE LA SUITE