« Elvis est fréquemment accusé d’avoir, à lui seul, volé le rock’n’roll au peuple noir. « Les Blancs ont volé le rock’n’roll aux Noirs » scandent encore et toujours les papillons sensibles de la musique. Bien sûr, les maisons de disques appartenant aux Blancs ont escroqué sans vergogne d’innombrables musiciens noirs, mais les péquenauds, aussi, ont été dépouillés. Le rock’n’roll était essentiellement une musique sudiste, avec des influences noires et blanches entrelacées. Après tout, même le bluesman à la peau la plus sombre du Delta chantait ses chansons en anglais. Ce qu’il faut retenir, c’est que ce sont les maisons de disques du Nord et de Grande-Bretagne qui ont volé le rock’n’roll au Sud.
Si Elvis essayait de sonner Noir, il n’a pas fait du très bon boulot. J’entends plus de nervosité hillbilly et de western swing – des influences BLANCHES – dans sa musique que du jazz noir ou du blues. L’empreinte de la musique noire semble beaucoup plus profonde chez les Beatles et les Rolling Stones, mais ces bâtards de Rosbeefs sont bien moins souvent pointés du doigt qu’Elvis. Pourquoi ? Je me risquerais à dire que les Beatles et les Stones s’en sortent facilement non pas parce qu’il sont plus authentiquement « noirs » qu’Elvis, mais parce qu’ils étaient tout simplement moins péquenauds que lui. L’acharnement contre Elvis ne démontre pas une sensibilité pour le peuple noir, mais il démontre une haine envers les péquenauds. Ironiquement, on n’a jamais emmerdé les Beatles et les Stones parce qu’ils jouaient de la musique sudiste sans être eux-mêmes Sudistes.
Le taillage continuel d’Elvis et le culte voué à Elvis se sont développés indépendamment l’un de l’autre, mais ils se sont également nourri l’un l’autre. Plus son image a été décriée, plus ses partisans ont cherché à la redorer. Et plus Elvis était fiévreusement défendu, plus il était facile de le descendre. Au fur et à mesure qu’il gagnait en ridicule d’un côté, il devenait un vrai saint de l’autre.
De prime abord, Elvis Presley était pourtant un candidat improbable à la sainteté. Il n’était même pas un modèle convenable pour les adolescents. Sur cette fameuse photo où il pose avec Richard Nixon dans le cadre d’une campagne antidrogue, il a l’air tellement défoncé que c’est un miracle que ses rouflaquettes soient toujours en place. Elvis n’a jamais semblé avoir une âme complexe. Il aimait sa moman et n’a jamais succombé à des délires messianiques. Excepté dans sa course au commentaire social sur des chansons comme « In The Ghetto », sa musique était dépourvue de messages. Elvis représente presque une sorte de vide moral et spirituel – ni moral ni immoral. Une feuille blanche. Il a l’air dénué de substance, mais un récipient ouvert permet plus facilement aux gens de le remplir avec leurs propres significations. Il est tellement vide, que vous pouvez le fourrer avec n’importe quelle garniture de votre choix.
Les pop stars sont les fétiches du culte moderne et sont vénérés de la même façon que les saints l’étaient au Moyen Age. Les pop stars mortes d’autant plus. Mais contrairement à la plupart des idoles ressuscitées, Elvis avait déjà commencé à pourrir avant de mourir. S’il y a bien une période où il agissait tel un chaman, comme quelqu’un qui acheminait l’énergie spirituelle à un public enthousiaste, c’était à ses débuts, quand il était surnommé le « Hillbilly Cat ». Il a laissé le rituel le posséder, ce que tout le monde est en droit d’attendre d’un prêtre.
Mais dans les années soixante-dix, la sclérose l’a atteint et il est devenu une parodie de ses premières performances. Il s’était transformé en une figurine Elvis, bien au-delà de l’auto-parodie. Un Elton John hétérosexuel. Un cochon de démonstration bourré de drogues et décoré de paillettes. Une bête de foire, gobeur de pilules, une côte d’agneau avec des rouflaquettes, un Elvis-Godzilla sorti d’un comic, bouffant des donuts et oubliant les paroles de ses chansons. Tout le délire Loup-Garou hawaïen de Las Vegas est inexplicable pour moi. Un mystère culturel. Peut-être que c’est une référence à un certain symbolisme cabalistique cryptique qui me passe au-dessus de la tête. S’il avait survécu, ça n’aurait pas été beau à voir. Elvis avec des hémorroïdes de la taille d’une grappe de raisin et une prothèse auditive. Le Seigneur l’a aspiré au ciel en pleine érection. Tout en haut à la droite de Dieu, Elvis peut bander pour toujours. »
The Redneck Manifesto, Jim Goad, 1997.
Légende : Rebel Youth, Karlheinz Weinberger.
Elvis is frequently blamed for single-handedly stealing rock’n’roll from black people. « Whites stole rock ‘n’ roll from blacks, » chant the sensitive music butterflies again and again. Sure, white-owned record companies shamelessly defrauded countless black musicians, but the hillbillies were robbed, too. Rock ‘n’ roll was essentially Southern music, with interwoven black and white influences. After all, event the darkest-skinned Delta bluesman sang his songs in English. More on the mark, Northern and British record companies stole rock ‘n’ roll from the South.
If Elvis was trying to sound black, he didn’t do a very good job. I hear more jittery hillbilly/western swing – WHITE influences – in his music than I hear black jazz or blues. The thumbprint of black music seems much deeper on the Beatles and Rolling Stones, but those limey ratfinks don’t get blamed nearly as often as Elvis. Why? I’ll venture that the Beatles and Stones get off easy not because they’re more authentically « black » than Elvis, but because they’re less actual hillbilly than he was. Elvis-bashing doesn’t show sensitivity for blacks, it shows hatred of hillbillies. Ironically, the Beatles and Stones got away with performing Southern music because they weren’t Southerners.
Elvis-bashing and Elvis-worship sprang forth independently of each other, but they also tended to fuel each other. The more his image was maligned, the more his supporters sought to repair it. And the more feverishly Elvis was defended, the easier it was to jeer him. As he grew more ridiculous to one side, he became more saintly to the other.
Elvis Presley seems an unlikely candidate for sainthood. He wasn’t even a suitable teen role model. In that famous photo where he’s posing with Richard Nixon as part of some antidrug campaign, he looks so high it’s a wonder his sideburns aren’t flapping. Elvis didn’t appear to be a particularly complex soul. He loved his momma and showed no evidence of messianic delusions. Except for the race stab at social commentary in songs such as « In The Ghetto, » his music was barren of messages. Elvis seems almost a moral/spiritual blank – neither moral or immoral. An amoral canvas. He seems substance-free, but being an open container makes it easier for people to fill him with their own meanings. He’s so empty, you’re able to stuff his pastry shell with whatever cannoli filling you choose.
Pop stars are the devotional fetish items of modern worship in ways identical to which saints were venerated in the Middle Ages. Dead pop stars all the more so. But unlike most resurrected idols, Elvis had already started to rot before he died. If he had ever played the shaman’s role, of someone who channeled spiritual energy to a rapturous audience, it was in his early days as the Hillbilly Cat. He allowed the ritual to possess him, which is all you can ever ask of a priest.
But by the seventies he had become entirely ossified, a mockery of his earlier performances. He had become an Elvis cutout figurine, beyond self-parody. A heterosexual Elton John. A sequined, karate-chopping drug pig. A nunchaku-swinging, pill-gobbling, muttonchop-sideburned, comic-book Godzilla Elvis. Eating doughnuts and forgetting song lyrics. The Whole Hawaiian Vegas Werewolf thing he had on is inexplicable to me. A cultural mystery. Perhaps it’s some cabalistic cryptic symbolism that is flying right over my head. If he had lived, it wouldn’t have been pretty. Elvis with a grape cluster of hemorrhoids and a hearing aid. The Lord snatched him in heaven achieving an erection. Up at the right hand of God, Elvis can stay hard forever.
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