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Je suis la haie et l’eau noire

« Il n’y a rien de plus sot qu’un journal, du moins aussi longtemps que son auteur vit. Je n’ai jamais été découragé par la niaiserie, tout ce qu’on écrit de sincère est niais, toute vraie souffrance a ce fond de niaiserie, sinon la douleur des hommes n’aurait de poids, elle s’envolerait dans les astres. Que dire encore ? Si vous voulez souffrir tout seul, taisez-vous. Sinon n’allez pas chercher, sous prétexte de sympathie votre propre souffrance dans le cœur d’autrui avec une pince à sucre, en fronçant le nez, comme ce pauvre M. de Montherlant, d’un air de dire qu’on n’a pas faim, qu’on fait semblant, par politesse, qu’on a pris l’habitude, dans son enfance, d’une nourriture plus distinguée. Je sais cela, n’importe. Je sais aussi que je ne suis plus sûr de ceux pour lesquels j’écris, plus sûr du tout de trouver le chemin de leur tristesse ou de leur joie. Alors, à quoi bon ? Je n’aurais pas honte de les prier de me consoler, car bien que je ne sois pas affamé de consolation d’un pape ou qu’un cardinal, je ne serais pas assez fou pour repousser leur aumône. Mais la vie m’enseigne que nul n’est consolé en ce monde qui n’ait d’abord consolé, que nous ne recevons rien que nous n’ayons d’abord donné. Entre nous, il n’est qu’échange, Dieu seul donne, lui seul. LIRE LA SUITE