PUNK PRESS

PUNK: Se dit d’un mouvement musical et culturel apparu en Grande-Bretagne vers 1975 et dont les adeptes affichent divers signes extérieurs de provocation (crâne rasé avec une seule bande de cheveux teints, chaînes, épingles de nourrice portées en pendentifs, etc.) afin de caricaturer la médiocrité de la société. (Larousse)

Fanzines, magazines; interviews, manifestes; dessins, photos; art, vomi; bruit, musique; sexe, violence; pose, combat; aversion, infiltration; Vincent Bernière et Mariel Primois ont compilé, à la façon de Teal Triggs (FANZINES, Révolution DIY), visuels, couvertures et extraits des morceaux de papiers qui ont fait du punk un mouvement. Le mouvement né mort. 200 pages illustrées en haute définition suivies de 30 pages de commentaires qui vont à l’essentiel et apportent archives et infos sur les tenants et les aboutissants. Un ouvrage tape à l’œil, forcément partial (Internet fait le reste), discutable, mais qui ne s’écoute pas raconter, en bref: PUNK quoi.



I’M SO BORED WITH THE USA!

Matériel: The East Village Other – I Wanna Be Your Dog – Frendz – Interview – Ace – East Village Eye – Punk – Berkeley Barb – New York Rocker – New Order – Search & Destroy – Slash – Flip Side – Rock Scene – Bomp! – Wet – Slick …

« Le Rock possède toujours deux visages. En Phrance, l’un est hideux et l’autre d’une beauté sauvage, désespérée mais hélas fugitive. Dans le premiers cas le Rock est un ersatz de ce que dispense le conglomérat des naufragés du Twist, vétérans des bals populaires, jazzeux reconvertis et autres anciens du Golf Drouot. C’est une culture qui fleure bon le calembour épais, l’urinoir et le graillon. C’est le quotidien des groupes qui entretiennent de bons rapports avec la presse « spécialisée » dont les représentants (de ridicules fantoches dans leur immense majorité…) les feront figurer, à l’issue de leur banquet annuel , parmi les élus d’un référendum pompeusement intitulé « GP de la PMF ». C’est une variété dépoussiérée, le fond sonore au week-end de « liberté » acheté par la semaine d’esclavage. C’est une proposition bien séduisante pour le Pouvoir qui l’introduit dans ses foires agricoles et ses supermarchés. C’est un hymne à la médiocrité, une mise en lumière involontaire des tares dont souffre la Vieille Phrance. C’est la musik passe-partout, diffusée, promotionnée, exploitée par les malfrats du show-business: jeunes cadres dynamiques, disc-jockeys sans envergure, petites pègres des coulisses, épiciers mythomanes, provinciaux minables venus tenter leur chance à Paris. Et derrière tout cela, on trouve la Presse des Détritus. C’est le triomphe de tout ce qui végète. Pop est un mot abject que nous n’emploierons plus. Le second visage du Rock phrançais est au premier ce qu’une étincelle de vie peut être à un amas de chair putrides. Nous reviendrons sur ce miracle là… »

Yves Adrien, Manifeste de la panthère électrique, Parapluie n°10, 1972.



ANARCHY IN THE UK!

Matériel: ZigZag – Sniffin’ Glue – Ripped & Torn – Suburban Press – Suburban Revolt – Dada – Dirt – Safe As Milk – Damaged Goods – Shews – Kingdom Come – Marsbar – Another Tuneless Racket – Blah Blah Woof Woof – Bondage – Punkture – More On Four – Chainsaw – Geek – In The City – NME – New Musical Excess – Panache – The Armagideon Times – Situation Vacant – Negative Reaction – Dangerous Logic – Rapid Eye Movement – Emetick! – Confidential …

« Nouveaux dandysmes les punks? Sublimation de l’inutilité et de l’insignifiance. Frusques, gueules, provocation. Poison qui drogue les années 70. Décennie d’inflations et de crises en tout genre. Exagération. La ville suppure dans sa crasse sociale. Fric. Pas de fric. Boulot. Pas de boulot. Echapper. La folie se maquille des airs de cet ennui. De noir et de sang. Outrance de l’image. Faillite des idées. La perversité répond à l’ignoble. Ricanement. Fuir. Le punk rock. Detruire. La peur comme dérision. Dandies… les punks seraient-ils la bonne conscience de quelques-uns? Narcisse, aujourd’hui est punk. Et son miroir d’eau pue le pétrole. »

Alain Macaire, Canal n°16, 1978.



MADE IN PHRANCE!

Matériel: Parapluie – Almanach Actuel – Rock News – I Wanna Be Your Dog – Rocks – Gare Du Nord – Annie Aime Les Sucettes – Rock’n’Roll Musique – Feeling – Bulletin Périodique – Sud – Subjectif – Canal – Métal Hurlant – L’Écho des Savanes – Babylone’s Bluette – Un Regard Moderne – Un Regard Sur Le Monde – Elles Sont de Sortie – Façade.

« Ça suffit ! On reprend la PAROLE, pour ne plus la lâcher, sinon pour se torcher LE CUL avec ce que vous serez obligés d’écrire sur nous. FAUT CE QUI FAUT ! Marre des criTIQUES et des romans où les bien-pensants, croisant leur image dans un miroir, CONstatent qu’ils ont pris un coup de vieux. Marre des PROfesseurs et du CLERC-ETAT qui nous interdisent de piner et de taper sur nos machines, si nous ne donnons pas d’abord le mode d’emploi. Marre des ZOPHES qui chient petit et mesquin et qui sont LAIDS à dégueuler. Marre des NECRIVORES qui, non contents de vivre PAR TRANSPARENCE tout ce qu’ils n’osent pas, font BATAILLE le matin, SEGUY le midi et HERSANT le soir. Marre des MAIGRES et des LACHES. NOUS, on sera, comme par le passé, du côté des mythes et des HEROS: nous INVENTERONS, nous ne commenterons pas.
À bas les sciences humaines ! Vive l’écriture inhumaine ! Nos maîtres radotent, profitons-en ! Refusons d’être au centre. Soyons des Sauvages. Ne nous embarrassons pas de nuances ! La plume au poing, et le tout dans leur gueule. Ça va saigner. Il n’y a pas de maîtres-penseurs et les Français sont plus dégueulasses que les Allemands ! On a toujours raison de se révolter. Quiconque accepte son sort n’est pas un artiste. Quiconque parle à Beaubourg ou écrit dans le Figaro-Dimanche n’est pas fréquentable. Ne nous endormons pas, battons la mort tant qu’il est temps. Vive Dieu, vive Satan ! Vive le sang, vive le foutre et vive l’urine ! Vive Staline ! Et vive Makhno ! Car nous sommes tous Staline et Makhno. CA VA SHLINGUER, les créateurs reviennent. QU’ON SE LE DISE… »

Gérard Guéguan, Editorial, Subjectif n°1, 1978.

« La « marge » a été, pour les plus habiles, un fabuleux moyen de faire carrière: l’ancien militant gauchiste a détrôné les vieux organisateurs: le hippy cool est devenu le « facilitateur » de relations humaines dont les entreprises avaient besoin; l’ancien journaliste d’Actuel, rédacteur au Monde, etc. […] Reste que cette critique est trop systématique pour ne pas cacher comme un profond regret que le rêve hippy ne se soit pas réalisé. Le punk, c’est la gueule de bois du réveil d’une nuit d’ivresse, quand la réalité reprend ses droits. »

Patrice Bollon, L’Echo des Savanes n°34, 1977.

PUNK PRESS: L’histoire d’une révolution esthétique 1969-1979, 2012.
(Éditions La Martinière)

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